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Au Gabon, la réforme des partis menace d’“étouffer l’expression pluraliste”

Au Gabon, la réforme des partis menace d’“étouffer l’expression pluraliste”

Une nouvelle loi, adoptée le 17 juin en première lecture par les autorités de transition du Gabon, redéfinit les conditions d’existence des partis politiques. Derrière les objectifs de modernisation affichés, certains craignent une régression démocratique, explique la presse gabonaise.

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Lecture 2 min. Publié le 20 juin 2025 à 15h55
Le président du Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema, tient la Constitution après avoir prêté serment à Libreville, au Gabon, le 3 mai 2025. À la tête de la transition après le coup d’État de 2023, à la suite duquel plusieurs réformes institutionnelles ont été engagées, le général a été élu en avril 2025. photo NAO MUKADI/AFP

Adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale de transition, la nouvelle législation sur les partis politiques au Gabon impose des conditions strictes pour l’existence légale d’une formation politique. Parmi les plus marquantes : l’obligation de justifier de 12 000 adhérents disposant d’un numéro d’identification personnel (NIP).

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Pour le député Jean Valentin Leyama, cette exigence est d’une sévérité inédite : “Pour réunir 12 000 signatures, il faut beaucoup de moyens”, a-t-il souligné dans Gabon Review. L’élu s’interroge sur la capacité des partis à satisfaire à ce critère, à l’exception de ceux “adossés au pouvoir et financés directement ou indirectement par ce pouvoir”, comme le Parti démocratique gabonais (PDG), qui a longtemps dominé la vie politique du pays jusqu’au renversement du président réélu Ali Bongo, en 2023. Début mai, le général Brice Clotaire Oligui Nguema a été investi président après sa large victoire à l’élection présidentielle.

Leyama s’inquiète par ailleurs des conséquences de cette réforme, qui pourrait entraîner “la disparition du paysage politique du pays” de partis historiques ayant contribué à la démocratisation du Gabon. Il cite notamment le Parti gabonais du progrès (PGP) de feu Agondjo Okawé ou encore le Congrès pour la démocratie et la justice (CDJ) du défunt Ogouliguendé. “Cela est grave”, alerte-t-il, redoutant la perte d’un “patrimoine politique” entier.

Comme l’explique Gabon Media Time, cette loi s’inscrit dans le contexte post-coup d’État du 30 août 2023, à la suite duquel plusieurs réformes institutionnelles ont été engagées. Portée par les ministres François Ndong Obiang et Hermann Immongault, la loi vise à “réguler, structurer et moderniser la scène politique”. Toutefois, le média alerte : “À trop vouloir encadrer, le risque est grand d’étouffer l’expression pluraliste, fondement de toute démocratie vivante.”

En plus du seuil des 12 000 adhérents, les partis doivent désormais répondre à une série d’exigences supplémentaires : siège social obligatoire, instances statutaires régulières, compte bancaire actif et participation à au moins deux scrutins successifs, sous peine de dissolution. Le texte prévoit également la suspension possible d’un parti en cas de trouble à l’ordre public, ainsi qu’un contrôle renforcé des finances par la Cour des comptes.

Ces mesures, bien que justifiables au nom de la transparence, selon Gabon Media Time, pourraient devenir, craignent certains observateurs, des leviers de mise au pas dans un contexte encore marqué par la concentration du pouvoir.

Un autre article de Gabon Review rappelle que “les partis politiques ne sont ni des institutions de la République ni des instruments d’exercice du pouvoir”, mais des outils d’identification citoyenne et de participation démocratique. Leur raréfaction, conclut le média, pourrait entraîner “la réduction drastique du pluralisme politique” et une dangereuse “atonie du débat public”.

Courrier International

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